Quand une pompe à essence devient un champ de bataille verbal (et que mon binôme me sauve du ridicule)
- francisbielak

- 6 nov.
- 6 min de lecture
C'est votre blogueur préféré, le décrypteur d'âmes et le maître des mots, qui reprend le micro. Aujourd'hui, je vais vous plonger dans une autre de mes "aventures" où la théorie de la self-défense verbale s'est frottée à la réalité d'une station-service. Et croyez-moi, même après des années passées à désamorcer des situations bien plus explosives, un simple plein d'essence peut parfois se transformer en mini-crise diplomatique.
Vous savez, on parle beaucoup des missions en elles-mêmes, de l'adrénaline, de la tension. Mais la réalité du terrain, c'est aussi les moments "entre deux", le retour à la normale, les tâches du quotidien qui surviennent quand votre cerveau est encore en mode "alerte rouge", mais que le reste du monde, lui, a déjà tourné la page. Et c'est souvent là que les faux pas arrivent.
Mon parcours, vous le connaissez : membre d'un groupe d'intervention spécialisé, des nuits à perfectionner mon "eye contact" de mentaliste, et un amour inconditionnel pour les arts martiaux (mon 4ème dan vous salue depuis le placard). Ces années m'ont appris que la fatigue, le stress post-mission, c'est un peu comme un interrupteur caché : ça rend le fusible plus fragile.
Je suis un fervent défenseur de la communication comme première ligne de défense. Mais parfois, même le meilleur d'entre nous peut se faire prendre au dépourvu. C'est là qu'un bon binôme entre en scène.
Aujourd'hui, je vais vous raconter une anecdote personnelle où la communication, ou plutôt le manque de ma propre communication à un instant T, a failli me coûter cher (pas en argent, mais en dignité), et où mon binôme a brillé par sa capacité à me remettre sur les rails. C'est aussi ça, l'essence du travail d'équipe.
Nous étions en fin de mission. Une mission longue, tendue, sans incident majeur, mais avec cette pression constante qui vous ronge les nerfs. Les autres gars du groupe étaient déjà rentrés au bercail, prêts à décompresser. Mon binôme, appelons-le Kiki ( surnom), et moi, étions les derniers. Ma tâche : faire le plein du véhicule banalisé avant de le ramener à la base.
C'était une station-service de banlieue, déjà plongée dans la pénombre du début de soirée. Peu de monde, l'ambiance était calme, presque trop. Mon corps commençait à se relâcher, mais mon cerveau, lui, tournait encore en boucle sur les détails de la journée. Un état bizarre, entre l'épuisement et l'hyper-vigilance.
J'étais à la pompe, concentré sur le débit de l'essence, essayant de chasser les dernières images de la mission de mon esprit. Kiki était assis côté passager, le regard vague, lui aussi probablement en train de "débriefer" mentalement.
Et là, la sirène. Pas une sirène de police, non. Un KLAAXOONNN strident, long, insupportable, venant de la voiture derrière moi. Un bon vieux monospace, avec un type au volant qui semblait avoir un rendez-vous urgent avec son ulcère.
Mon sang, qui commençait à peine à se refroidir après la mission, a fait un bond. Mon "fusible" a grillé en une fraction de seconde.
Le type derrière moi continuait de klaxonner, avec une insistance qui frôlait l'agression sonore. Mon mentaliste intérieur, mon expert en décryptage, mon formateur en gestion de conflit... tout ça était parti en fumée. Ce qui restait, c'était le gars fatigué, sous tension, qui venait de passer une journée à éviter les problèmes, et qui se sentait maintenant agressé pour une histoire de pompe à essence.
J'ai retiré le pistolet à essence avec un mouvement sec, l'ai raccroché, et je me suis tourné vers le monospace. Mon visage devait être un tableau. Je ne sais pas ce que je voulais faire, peut-être lui faire un cours express sur l'étiquette en station-service, ou lui demander s'il avait une sonnette à la place du klaxon.
Le conducteur, un grand gaillard avec une barbe mal taillée et un t-shirt un peu trop serré, a baissé sa vitre avec un air défiant.
Lui : « Alors, on a fini de se traîner, grand-père ? Je suis pas là pour passer la nuit ! »
Mon cerveau a enregistré "grand-père". Grand-père ? Moi ? Qui venait de passer 12 heures à courir dans des zones hostiles ? Mon ego a pris le coup. Mon entraînement a commencé à me crier de prendre le contrôle de la situation, mais pas avec les mots. Mon corps était prêt à l'action. Mes mains se sont légèrement contractées.
J'étais sur le point de sortir de ma bouche une réplique cinglante, le genre qui ne laisse aucune chance, quand une voix calme et posée a brisé la tension.
Kiki, mon binôme, que je pensais encore perdu dans ses pensées post-mission, avait baissé sa propre vitre. Il m'a regardé, puis a regardé le gars du monospace. Son ton était d'une neutralité désarmante, presque ennuyée.
Kiki (d'une voix qui portait juste assez, sans être agressive) : « Excusez-nous monsieur. Mon collègue est un peu dans la lune aujourd'hui. On rentre de mission, ça a été une longue journée. On a besoin de quelques minutes pour faire le plein du véhicule. On fait au plus vite, promis. »
Analyse de l'intervention de Kiki :
L'Excuse (la Désescalade Immédiate) : Il a présenté des excuses, mais sans se rabaisser. Il a mis mon "erreur" sur le compte de la fatigue, une raison universellement compréhensible.
L'Explication (la Légitimisation) : "On rentre de mission, ça a été une longue journée." Sans donner de détails, il a évoqué notre métier, notre état de fatigue. Cela a immédiatement fait passer le gars du monospace d'un statut de "généralisé" à celui de "potentiel collègue de travail fatigué".
La Promesse (l'Ancrage Temporel) : "On fait au plus vite, promis." Il a rassuré l'autre sur le fait qu'il n'allait pas attendre une éternité.
Le Ton (la Neutralité qui Tue) : Son ton était calme, sans aucune agressivité. Il a cassé le rythme du conflit avant même qu'il ne démarre.
Je suis resté là, le mot à la bouche, un peu sidéré par la rapidité et l'efficacité de l'intervention de Kiki. Le gars du monospace, lui, a cligné des yeux, comme s'il venait de sortir d'une transe. L'air de défi sur son visage s'est estompé, remplacé par une expression plus neutre. Il a marmonné un truc inaudible, quelque chose comme "Ah, la mission...".
J'ai senti la tension se relâcher dans mes épaules. Kiki venait de me donner une leçon magistrale de gestion de conflit, et il l'avait fait en moins de trente secondes, sans même sortir de la voiture.
J'ai fait le plein en quelques secondes, raccroché le pistolet, et je suis monté dans la voiture.
Moi : (en démarrant) « Merci, Kiki. »
Kiki : (avec un petit sourire en coin) « De rien. Fallait bien que quelqu'un sauve la face de l'expert en communication. T'étais sur le point de lui faire un discours sur le droit de klaxonner. »
Il avait raison. J'étais fatigué, en mode réactif, et j'avais laissé mon ego prendre le dessus. Mon expertise en self-défense verbale avait été mise de côté par la fatigue et la frustration. Marc, lui, avait gardé son sang-froid et avait appliqué les principes que j'enseigne tous les jours. C'était un rappel puissant : même les meilleurs ont leurs moments de faiblesse, et c'est là que le soutien extérieur est indispensable.
Cette anecdote me rappelle toujours que la self-défense n'est pas qu'une affaire de techniques physiques ou de rhétorique impeccable. C'est aussi une affaire de gestion de soi, de conscience de son propre état émotionnel, et de l'importance du réseau. Mon binôme a été mon filet de sécurité ce soir-là, ma voix de la raison quand la mienne était brouillée.
C'est ça, la vraie synergie. C'est savoir que même quand votre propre armure mentale se fissure sous la fatigue, quelqu'un peut être là pour colmater la brèche avec un simple "Excusez-nous monsieur".
Mon cher Buyer Persona, l'homme ou la femme qui évolue dans un monde parfois agressif et imprévisible, cette histoire est pour vous.
Connaissez vos limites : La fatigue, le stress, ça diminue vos capacités. Soyez-en conscient.
Ayez un filet de sécurité : Que ce soit un binôme, un ami, un collègue, quelqu'un qui peut vous ramener à la raison.
La communication est un art constant : Même les experts peuvent faire des erreurs.
L'humilité est une forme de force.
Cette nuit-là, j'ai rappris que la self-défense, ce n'est pas seulement se défendre des autres, mais aussi se défendre de soi-même, de ses propres impulsions quand on est à bout. Et parfois, le meilleur expert en communication, c'est celui qui est assis à côté de vous et qui a la clairvoyance de parler à votre place.
Alors la prochaine fois que vous êtes épuisé et qu'un klaxon vous agresse, respirez un grand coup. Et si vous avez un Kiki à côté de vous, laissez-le faire sa magie.
Restez vigilant, restez humble, et n'oubliez jamais l'importance d'un bon binôme !
Francis, éternel apprenant.
P.S. : Avez-vous déjà vécu une situation où la fatigue ou le stress vous a fait réagir de manière inattendue ? Comment avez-vous géré ça ? Ou avez-vous un "Kiki" dans votre vie qui vous a sauvé la mise verbalement ? Partagez vos anecdotes, ça enrichit notre communauté !



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